3 - Les unités spécialisées dans
l'Espace
3.4 - Alcatel Thomson Espace et Alcatel Espace (ATES)
Une première action d'intéressement du personnel au bon
déroulement d'une affaire est à signaler dans le cadre du
programme Symphonie. La bonne gestion du fonds de réserve
mis en place dès le début du programme au niveau du consortium
CIFAS pour couvrir certains aléas a permis de dégager une
certaine marge financière. Les six sociétés membres,
dont Thomson CSF, décident alors d'en faire profiter tous leurs
salariés ayant travaillé sur le programme. Cette action,
qui n'a aucun caractère contractuel, suscite quelques polémiques
où le mot «favoritisme» est souvent prononcé.
Elle ne se renouvellera pas dans les programmes suivants.
C'est beaucoup plus tard que se matérialiseront des actions d'intéressement
qui revêtiront une forme contractuelle.
Dans le droit fil de la pensée gaullienne, une ordonnance de
1959 organisait un régime facultatif d'association ou d'intéressement
des travailleurs. Ces textes, remaniés à diverses reprises,
aboutirent à une ordonnance du 21 octobre 1986 définissant
un régime «d'intéressement» des travailleurs
aux résultats ou aux progrès de l'entreprise qui vint compléter
le régime légal de la «participation».
D'autres textes spécifièrent les régimes des «plans
d'épargne d'entreprise», «d'actionnariat des salariés»
ou «d'options de souscription ou d'achat d'actions» par les
salariés.
Ces textes offrent divers avantages fiscaux et notamment le fait que
l'intéressement des salariés est exonéré de
charges sociales et, sous certaines conditions, d'impôt sur le revenu
dans la mesure où le salarié reverse cet intéressement
dans un plan d'épargne d'entreprise où il va rester bloqué
cinq ans.
L'un des éléments essentiels de ce que l'on pourrait appeler
la «problématique de gestion» d'ATES résulte
de la grande variation des charges de travail. Un programme de plus, et
l'entreprise croule sous la charge au point de prendre le risque de mal
travailler, ce qui est impardonnable dans le monde de l'espace. Un programme
de moins, et les mesures de réduction des moyens se profilent vite
à l'horizon
Aussi l'intéressement est-il un moyen efficace
de récompenser l'ensemble du personnel en période de surcharge
et de «partager la pénurie» entre le «capital»
et le «travail» lorsque la situation est difficile.
C'est ainsi que début 1987, instruit par la période difficile
de l'année 1985, ATES va négocier avec les représentants
du personnel un premier accord d'intéressement couvrant les exercices
86 à 88. Celui-ci va reposer sur deux principes :
- une participation aux efforts d'amélioration de la productivité,
indépendante de l'existence ou non de bénéfices ;
- un partage des bénéfices sociaux.
Ces deux principes seront retenus dans les deux accords suivants, signés
en 1989 et en 1992.
La prime de progrès
Compte tenu du fait qu'ATES ne produit pas de biens ou services
répétitifs pour lesquels il peut être possible de mesurer
l'évolution de la productivité, la formule choisie vise à
tenir compte de la variation de la valeur ajoutée moyenne mesurée
par salarié. Étant rappelé que, tout simplement, la
valeur ajoutée n'est rien d'autre que le chiffre d'affaires diminué
des achats de toutes natures, c'est-à-dire ce qui a été
produit par l'entreprise pour être vendu. Cette valeur ajoutée
se trouve de la sorte augmentée par les marges réalisées
à la vente, par les réductions de prix obtenues à
l'achat, par les économies faites sur les consommations de matière
et de main-d'oeuvre, puisque le critère retenu vise à mesurer
cette valeur ajoutée par salarié. Une formule en 1987 remplacée
par un barème plus compréhensible en 1989 et 1992 est retenue.
La prime de résultat
Elle est tout simplement calquée sur la formule officielle
de la «participation des salariés» afin qu'il n'y ait
pas de rupture, le jour où ATES aurait «absorbé»
tous ses reports déficitaires fiscaux constitués au cours
des années déficitaires de 1984 et 1985. On sait que cette
formule prélève en priorité sur le résultat
fiscal une «rémunération des capitaux propres»
et le solde se trouve partagé entre l'entreprise et ses salariés
au prorata des salaires par rapport à la valeur ajoutée.
Toutefois, au cours des premières années, l'existence des
reports fiscaux antérieurs est neutralisée dans le calcul
de l'intéressement afin de motiver le personnel à redresser
la situation d'une entreprise qui a été fortement perturbée
en 1984 et 1985.
Les règles de partage
Elles font l'objet de débats courtois mais énergiques,
l'avis de la Direction et de chacune des organisations syndicales n'étant
pas le même. On finit par se mettre d'accord sur un partage, en partie
hiérarchisé et en partie non hiérarchisé, de
chacune des primes (voir tableau ci-dessous).
Un système de «plancher» déhiérarchise
un peu plus les résultats obtenus. Ces primes sont payées
pour partie en février, et le solde est versé après
l'approbation des comptes par l'assemblée générale
des actionnaires courant juin.
Les résultats obtenus
Année
|
Intéressement + participation
|
Calcul exprimé en mois de rémunération
nette (cotisations du salarié déduites) |
1986
|
2 900 kF
|
1/3 de mois |
1987
|
5 100 kF
|
1/2 mois |
1988
|
9 700 kF
|
80 % d'un mois |
1989
|
12 100 kF
|
80 % d'un mois |
1990
|
11 100 kF
|
70 % d'un mois |
1991
|
19 200 kF
|
110 % d'un mois |
1992
|
18 500 kF
|
1 mois |
1993
|
22 500 kF
|
115 % d'un mois |
Le plan d'épargne d'entreprise
Afin de bénéficier totalement des avantages fiscaux
offerts par la loi sur l'intéressement, un plan d'épargne
d'entreprise est constitué sous la présidence de l'amiral
Roitel, la gestion en étant confiée au Crédit Lyonnais
en 1986, puis partagée avec Inter-Expansion en 1992.
Année de l'accord
|
Prime de productivité
|
Prime de résultat
|
|
Hiérarchique
|
Non hiérarchique
|
Hiérarchique
|
Non hiérarchique
|
1987
|
50 %
|
50 %
|
100 %
|
0 %
|
1989
|
65 %
|
35 %
|
75 %
|
25 %
|
1992
|
65 %
|
35 %
|
75 %
|
25 %
|
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Les dirigeants successifs des unités évoquées
dans le présent ouvrage. De gauche à droite: Jacques Chaumeron,
Directeur de ESA puis DSP (1970-1982), Gérard Coffinet, Directeur
de DSP puis DG d'Alcatel Espace (1982-1986), Jacques Imbert, Président
d'Alcatel Espace (1984-1994), Jean Valent, vice-Président d'Alcatel
Espace (1985-1988), et Jean-Claude Husson, DG puis P-DG d'Alcatel Espace
(depuis 1986). |
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