6 - Les programmes de satellites
6.1 - Les satellites scientifiques
Le
projet Mars Balloon Relay (MBR) fait partie d'une
mission scientifique concrétisant une proposition
du professeur Jacques Blamont, du CNES, et associé
aux programmes américain Mars Observer 92
et russe Mars 94. Le CNES est le responsable scientifique
de la mission et coopère avec la NASA américaine
et l'organisme russe IKI.
Les sondes russes doivent emporter quatre stations à déposer
sur le sol martien et deux ballons destinés à évoluer
dans l'atmosphère martienne.
Ce matériel MBR, placé à bord de la sonde Mars
Observer, a pour mission d'assurer les liaisons avec l'infrastructure
martienne (ballons et stations) dans la bande des 400 MHz : émetteur
de télécommande, récepteur de télémesures,
antennes. Ces équipements doivent transmettre les interrogations
aux matériels d'infrastructure, collecter les données scientifiques
qui en proviennent et les localiser en exploitant l'effet Doppler sur la
porteuse de télémesure.
La
transmission des données vers la Terre doit être
assurée par Mars Observer dont la mission
principale est de photographier la planète afin
d'en effectuer une cartographie précise.
En 1988, le CNES informe Alcatel Espace de son intention de lui faire
réaliser l'ensemble MBR. Il s'agit d'un marché de gré
à gré mais avec de très fortes contraintes de délai
de livraison et, surtout, d'enveloppe financière.
Les équipements doivent s'adapter aux interfaces des systèmes
américain et russe. Les spécifications initiales sont très
imprécises, et le contexte de la coopération trilatérale
(France, USA, URSS) particulièrement compliqué.
L'état d'avancement du projet est également très
différent chez l'un et l'autre partenaires. La tâche du premier
chef de projet, Laurent Diderot, n'est donc pas particulièrement
aisée, d'autant que la première année d'activité,
les phases O et A, ne bénéficie d'aucun financement du client
qui manifeste malgré tout son impatience de voir les travaux avancer
rapidement.
La définition précise des interfaces donne lieu à
quelques péripéties car, en 1988, les Américains travaillent
déjà depuis plusieurs années sur Mars Observer
alors que les Russes ont à peine démarré leur projet
en ce qui concerne les stations.
Un
voyage à Moscou, organisé en 1988, permet
à Laurent Diderot, au prix de quelques savoureuses
anecdotes, d'être initié aux méthodes
de travail avec les agences soviétiques.
En mars 1989, après une phase B toujours non financée
par le client, une proposition lui est remise pour la phase C/D. Les spécifications
détaillées des divers éléments du MBR ont été
écrites afin de pouvoir lancer des appels d'offres pour leur fabrication.
Quelques difficultés techniques sont apparues, notamment le risque
de brouillage des émissions des stations par celles des ballons.
La principale difficulté est cependant d'ordre financier. Le
premier devis affiche un prix supérieur au double de l'enveloppe
fixée par le client. Après d'actives négociations,
il est décidé de sous-traiter la fabrication des cartes à
des PME de la région toulousaine. Après une consultation,
la société CEIS est retenue.
Alcatel Espace reste maître d'oeuvre de l'ensemble et se porte
garant des procédures de réalisation et de la qualité
du matériel. Il agit également en tant que centrale d'approvisionnement
des composants.
Cette organisation est la source de quelques divergences d'opinions,
notamment vis-à-vis de la divulgation à un tiers, en l'occurrence
CEIS, des procédures de fabrication propres à Alcatel Espace.
Pierre de Château Thierry, chef de projet du MBR pour la phase
C/D, à partir de juillet 1989, doit en l'occurrence faire preuve
d'une certaine diplomatie pour naviguer entre des positions internes radicalement
opposées. Finalement, le tandem Alcatel/CEIS fonctionne bien et
prouve son efficacité.
Les livraisons de matériels se terminent en janvier 1992, dans
des conditions de performances techniques et de délais très
satisfaisantes. Il apparaît, en mars 1992, au cours des essais d'intégration
au
Mars Observer conduits chez son maître d'oeuvre américain
GE Astro, que la mauvaise qualité spectrale du signal de référence
à 10 kHz, fourni par l'équipement américain, dégrade
de façon inacceptable les performances du MBR.
C'est
là que la coopération entre Alcatel et CEIS
confirme de nouveau son efficacité. Les équipements
d'Alcatel sont rapatriés et, en moins d'un mois,
équipés d'un générateur autonome
à 10 kHz puis intégrés à nouveau
dans la sonde chez GE Astro aux États-Unis.
C'est l'occasion pour la Direction Générale du CNES d'exprimer
par écrit à Alcatel Espace, en juin 1992, sa «satisfaction
tant sur le développement et la réalisation de l'instrument
dans un contexte calendaire et budgétaire tendu que sur l'assistance
technique apportée à l'équipe Projet CNES pendant
les travaux d'intégration et d'essais dans les locaux de GE Astro».
La sonde Mars Observer, qui emporte le MBR, est lancée
le 25 septembre 1992. Après un voyage de onze mois (725 millions
de kilomètres), avant la mise en orbite autour de Mars, le contact
est perdu, la cause probable étant une explosion due à une
rupture de canalisation dans le système de propulsion.
À la suite de MBR, Alcatel Espace fournit, toujours avec CEIS,
un matériel semblable, le RDM (Relais de Données Martien)
destiné à la sonde russe Mars 94, devenue plus tard
Mars
96. Le lancement de cette sonde est un échec le 16 novembre
1996.
Enfin, un exemplaire supplémentaire du MBR est fourni pour la
sonde américaine Mars Global Surveyor, lancée le 6
novembre 1996. Son fonctionnement est annoncé comme «nominal»
après les quarante-huit premières semaines de trajectoire. |