6 - Les programmes de satellites
6.2 - Les satellites de télécommunication
OTS
À partir de 1970, l'ESRO, dont la mission initiale est limitée
au domaine des satellites scientifiques, examine la possibilité
de promouvoir les techniques et les technologies européennes dans
le domaine des satellites d'applications.
Parallèlement, l'association des industriels européens,
Eurospace, a créé un groupe de travail, présidé
par Jacques Chaumeron, qui y représente Thomson-CSF, et chargé
de la promotion des applications des satellites dans le domaine des télécommunications
et de la télévision.
Après un certain nombre de discussions, l'ESRO réussit
à faire adopter par le Conseil des ministres des pays membres le
principe de programmes de satellites d'applications dits «à
la carte», ce qui signifie que seuls les pays volontaires participeront
à leur financement, le «juste retour» pour l'attribution
des marchés à l'industrie étant défini en conséquence.
Dès juillet 1970, cinq MUC (Millions d'Unités de Compte)
ont été engagés par l'ESRO pour des études
préliminaires de définition d'un futur satellite européen
de télécommunications. À ce titre, de décembre
1970 à janvier 1971, divers marchés sont passés à
l'industrie.
Les consortiums Cosmos, MESH et STAR, menés respectivement par
Aérospatiale, Hawker Siddeley et British Aircraft, reçoivent
chacun un marché portant sur le satellite. AEG-Telefunken et Siemens
se voient confier, chacun, une étude de répéteur modulaire
en bande Ku pour le satellite. Enfin, AEG-Telefunken et Thomson-CSF (Division
Tubes Électroniques) reçoivent, chacun également,
un marché pour la réalisation d'une maquette d'ATOP en bande
Ku.
Au cours de l'année 1971, l'ESRO continue ses propres études
en comparant en particulier les mérites de diverses options quant
à la forme que pourrait revêtir le premier satellite expérimental.
Une solution économique pourrait être l'utilisation de
Symphonie
B mais ce dernier opère en bande C. Une autre solution utiliserait
un satellite britannique en cours de définition et baptisé
GTS.
La
troisième solution est évidemment un satellite entièrement
nouveau, opérant en bande Ku, baptisé
OTS (Orbital
Test Satellite).
Entre-temps, une décision du Conseil, datée du 20 décembre
1971, a précisé que ces programmes d'applications, qui doivent
être menés simultanément, concerneront l'aéronautique,
la météorologie et les télécommunications.
Dans le domaine aéronautique, la vie et la mort du programme
Aerosat,
à la préparation duquel le Département ESA (puis DSP)
participe pendant plusieurs années, sont relatées dans un
chapitre qui lui est entièrement consacré.
Dans le domaine météorologique, le premier programme Meteosat
est gagné par le consortium Cosmos, où le maître d'oeuvre
est l'Aérospatiale, et de ce fait le Département ESA, qui
appartient au consortium STAR, ne peut y participer.
Dans le domaine des télécommunications, ce n'est que vers
la fin de 1972 qu'est décidé le principe d'un satellite expérimental
et préopérationnel baptisé OTS.
Dans les études de définition préliminaires, outre
l'étude de l'ATOP, Thomson-CSF participe à l'étude
d'un récepteur et des OMUX faisant partie du répéteur
modulaire sous la maîtrise d'oeuvre d'AEG-Telefunken. Conformément
au projet d'accord qui est alors en cours de négociations entre
la Division AVS - dont fait partie le Département ESA - et la Division
DFH, c'est cette dernière qui prend l'étude en charge.
Fin 1972, l'ESRO passe aux industriels les premiers marchés de
phase A pour l'ensemble du satellite OTS, les répéteurs
et les antennes, se réservant le contrôle direct des études
concernant ces deux derniers sous-ensembles, sans passer par l'intermédiaire
du maître d'oeuvre du satellite. À Thomson-CSF, les avis divergent
quelque peu sur la stratégie à adopter.
Au Bureau des Activités Spatiales du siège, on voit les
choses en grand : le maître d'oeuvre d'un programme de satellite de
télécommunications ne peut être qu'une société
d'électronique compétente en matériels de télécommunications,
telle que Thomson-CSF. À la Division AVS et au Département
ESA, on voit les choses d'une manière beaucoup plus terre à
terre : le Département ESA a été constitué
récemment et il ne possède ni la compétence ni l'expérience
pour avoir une chance, à l'époque, de battre dans une compétition
les nombreux candidats déjà expérimentés à
la maîtrise d'oeuvre de satellites. On peut en dénombrer au
moins sept en Europe. De plus, étant donné le faible nombre
de programmes de satellites prévus en Europe dans les dix années
à venir, comment peut-on alimenter d'une manière continue
une équipe de maîtrise d'oeuvre, pendant cette période,
compte tenu de la règle du «juste retour» en vigueur
à l'ESA, seul client valable pour encore plusieurs années
? Sans perdre l'espoir d'acquérir progressivement les compétences
en maîtrise d'oeuvre de satellites, mieux vaut, pour l'instant, se
contenter par exemple de celle des répéteurs ou des antennes,
pour laquelle les compétences existent à Thomson-CSF.
Dans une première phase, Vladimir Altovsky, Directeur du Bureau
des Activités Spatiales, a obtenu, afin que Thomson-CSF conserve
ses chances d'obtenir la maîtrise d'oeuvre du satellite, que celle
des répéteurs soit «abandonnée» à
AEG-Telefunken, qui a sauté sur l'occasion de l'obtenir pratiquement
sans concurrence. Il reste ensuite à se faire accepter comme maître
d'oeuvre du satellite dans la proposition que doit préparer le consortium
STAR, auquel Thomson-CSF est lié pour tous les programmes de satellites
de l'ESA. C'est oublier que ce consortium comprend déjà deux
candidats maîtres d'oeuvre ayant déjà au moins une expérience
de ce genre à leur actif : British Aircraft (BAC) et Dornier.
Au moment de choisir, au sein du consortium, celui des trois candidats
qui en défendra les couleurs dans la phase B, Thomson-CSF se trouve
en minorité et c'est BAC qui l'emporte.
Le 28 août 1972, une démarche est tentée par Vladimir
Altovsky, accompagné de Jacques Chaumeron, pour tenter de récupérer,
auprès d'AEG-Telefunken, la maîtrise d'oeuvre des répéteurs
mais, comme il fallait s'y attendre, cette démarche échoue
et Thomson-CSF doit se contenter d'être, dans ces mêmes répéteurs,
sous-traitant d'AEG-Telefunken, pour les récepteurs et les filtres
multiplexeurs de sortie (OMUX), la Division Tubes de Thomson-CSF fournissant
pour sa part les tubes à ondes progressives à 11 GHz.
Une tentative du Bureau des Activités Spatiales de faire créer
une maîtrise d'oeuvre intermédiaire, celle de la charge utile,
coiffant les répéteurs et les antennes, n'est pas retenue
par l'ESRO.
À partir de ce moment, l'action du Département ESA se
manifeste dans deux directions :
- le sous-système télémesure-télécommande
(TM-TC) ;
- les matériels de répéteurs.
Pour la maîtrise d'oeuvre du satellite, la phase B se déroule
durant l'année 1973. À la suite d'un appel d'offres émis
le 15 janvier 1973, deux consortiums y sont admis à partir du 11
avril : STAR, dont le maître d'oeuvre est BAC, et MESH, dont le maître
d'oeuvre est Hawker Siddeley Dynamics (HSD), c'est-à-dire en fait
deux maîtres d'oeuvre britanniques.
Au cours de cette phase B, et comme à l'habitude dans le consortium
STAR, le Département ESA fournit à BAC les éléments
nécessaires à l'avant-projet de satellite pour le sous-système
TM-TC.
À la fin de la phase B, qui se termine en septembre 1973, le
travail s'intensifie au Service ES et au Service Commercial du Département
pour la préparation de la proposition de phase C/D, où le
Département ESA doit être responsable du sous-système
TM-TC. L'établissement des prix donne lieu inévitablement
à
des discussions «animées» dans plusieurs réunions
du consortium.
Les propositions sont remises à l'ESRO par BAC et HSD. Au début
de novembre 1973, l'ESTEC, établissement technique de l'ESRO, remet
son rapport d'évaluation qui place BAC et le consortium STAR en
tête, et recommande que le marché des phases C/D leur soit
attribué. Un obstacle important reste à franchir pour l'attribution
définitive, celui du Comité administratif et financier (AFC)
de l'ESRO, constitué de délégués de chacun
des pays membres qui doivent procéder à un vote.
D'après les informations réunies par Pierre Gautier, chef
du Service Commercial du Département ESA, la voix du délégué
français peut faire pencher la balance d'un côté ou
de l'autre. Il y a donc lieu d'intensifier la «campagne électorale»
car MATRA, membre français du consortium concurrent MESH, dispose
d'une influence qu'il convient de ne pas négliger.
Dans un programme de satellite de télécommunications comme
OTS,
deux ministères ont leur mot à dire dans les instructions
de vote à donner au délégué français
: le ministère des PTT et le ministère de la Recherche, qui
a la tutelle du CNES.
Thomson-CSF est mieux placé auprès du ministère
des PTT alors que MATRA a plutôt l'oreille de celui de la Recherche.
Malgré les assurances données aux représentants
de la haute Direction de Thomson-CSF par ceux du ministère des PTT,
les instructions du ministère de la Recherche de voter en faveur
de MATRA l'emportent et, le 29 novembre 1973, le consortium MESH est choisi
avec une voix d'avance.
À Thomson-CSF, la perte du programme OTS par le consortium
STAR, à la suite d'un vote politique et en dépit d'un rapport
d'évaluation favorable, provoque une déception considérable.
Le consortium MESH se voit établi auprès de l'ESRO dans
une position dominante qui, au-delà des deux modèles d'OTS,
se maintiendra dans la génération suivante des ECS et ne
sera interrompue que lorsque l'organisation Eutelsat, qui prendra la relève
de l'ESRO pour les satellites opérationnels, fera à nouveau
appel à la concurrence.
Malgré cette déconvenue, le Département ESA doit
toujours fournir, avec l'aide de la Division DFH, les récepteurs
(six modèles de vol par satellite) et les OMUX en bande Ku.
L'étude des récepteurs, exécutée à
DFH, permet de qualifier pour l'usage spatial une technologie de microélectronique
en couches minces sur substrat en céramique qui est déjà
en cours d'étude pour les faisceaux hertziens. Afin d'éviter
une duplication des dépenses, l'ESRO apporte un financement pour
l'étude et la qualification de cette technologie à AEG-Telefunken,
maître d'oeuvre des répéteurs, sous la condition que
cette société effectue, dans le cadre de son marché,
un transfert vers Thomson-CSF. Après quelques péripéties
inévitables dans ce genre d'opération où il faut résoudre
un certain nombre de malentendus causés par des différences
d'interprétation des spécifications, le procédé
de fabrication des circuits par évaporation sous vide obtient sa
qualification spatiale.
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Récepteur en bande Ku du satellite OTS
|
Les principaux acteurs en ont été Jean-Pierre Chenu, alors
responsable, avec Jean Fouillet, de la microélectronique hyperfréquences
à DFH, et Guy Bertaud qui, au titre de chef du projet OTS
au Département ESA, doit assurer la conformité du procédé
avec les règles de la qualité spatiale.
Après les études de maquettes réalisées
dans les laboratoires de DFH où Alain de Place puis Pierre de Bayser
sont successivement responsables de l'étude, les modèles
suivants des récepteurs sont réalisés et mis au point
au Département ESA par le Service Hyperfréquences (HY) dirigé
par Marcel Palazo. C'est bien entendu le Service de Fabrication du Département
qui procède à l'assemblage des circuits.
Pour les OMUX, qui sont réalisés en invar avec une première
tentative d'amincir les parois pour réduire le poids, les études
de maquettes sont effectuées à DFH, notamment par Pierre
de Bayser et Pierre Fraise puis, comme pour les récepteurs, c'est
le Département ESA qui prend en charge la fabrication et les essais
des modèles suivants jusqu'aux modèles de vol.
Ces deux matériels marquent le début de lignes de produits
qui, tout en évoluant en fonction des progrès techniques
et technologiques, constitueront l'un des principaux atouts des unités
successives qui donneront naissance à Alcatel Espace.
Les
antennes d'OTS ont fait l'objet d'une proposition à l'ESRO,
préparée par la section antennes du Service HY, dirigée
par Bruno Vidal Saint-André. Cette proposition n'est malheureusement
pas retenue, en grande partie pour des raisons de juste retour. L'Italie
réclame une part importante du programme OTS, ce qui justifie
l'attribution de la responsabilité des antennes à la société
italienne Selenia.
Après la fourniture des modèles d'identification et de
qualification, les livraisons des modèles de vol des récepteurs
(deux par satellite) et des OMUX (un par satellite) sont effectuées
en 1976, successivement pour chacun des deux satellites.
Le lancement du premier satellite, OTS I, tenté le 13
septembre 1977, se termine prématurément au bout de 54 secondes,
à cause d'un défaut de fonctionnement de l'un des propulseurs
auxiliaires à poudre de la fusée Delta 3914. Une partie
des équipements du satellite est récupérée
dans l'océan à proximité de Cap Canaveral.
Le second lancement, effectué le 11 mai 1978, est un succès
et le satellite OTS II accomplit normalement sa mission, ce qui
permettra au Département DSP d'encaisser des primes de vol pendant
quelques années.
MAROTS et MARECS
Dès 1966, des études sur l'utilisation des satellites
dans le domaine maritime ont été entreprises au sein de l'IMCO
(Intergovernmental Maritime Consultative Organization). Ces études,
qui portent non seulement sur l'évaluation des besoins opérationnels
et des caractéristiques à demander au système satellitaire
mais aussi sur les aspects économiques et institutionnels, aboutissent,
en septembre 1976, à la mise sur pied d'une organisation internationale
chargée de mettre en place et d'exploiter un tel système.
C'est la naissance d'Inmarsat qui aura une existence légale à
dater du 16 juillet 1979.
Parallèlement à ces études, un consortium américain,
dirigé par Comsat, entreprend, à partir de 1973, de construire
deux satellites à usage de télécommunications maritimes.
Le système Marisat, constitué de ces deux satellites
fabriqués par Hughes, entre en service au-dessus des océans
Atlantique et Pacifique au milieu de l'année 1976. Un troisième
satellite est lancé en 1978 pour desservir l'océan Indien,
complétant ainsi la couverture globale de l'ensemble du système.
Du côté européen, l'ESRO ne reste pas inactive.
Dans la foulée des études préparatoires au programme
OTS,
on examine comment on pourrait dériver du satellite
OTS un
satellite dédié aux télécommunications maritimes.
Pour les liaisons avec la terre, le choix est à faire entre la bande
C et la bande Ku. Les matériels fonctionnant dans cette dernière
bande ont fait l'objet d'études financées par l'ESRO qui
ont donné une certaine avance aux industriels européens dont
Thomson-CSF fait partie.
Pour les liaisons entre les satellites et les bateaux, les bandes de
fréquences qui ont fait l'objet d'attributions sont la bande S (1
636,5-1 644 MHz) pour les liaisons montantes (des bateaux vers le satellite)
et la bande L (1 535-1 542 MHz) pour les liaisons descendantes.
Au milieu de l'année 1973, l'ESRO est prête à lancer
la phase A, c'est-à-dire la phase de définition préliminaire
d'un satellite maritime qui s'appellera MAROTS.
C'est
l'époque où l'Europe spatiale est en crise. Les échecs
répétés du lanceur Europa ont conduit la France,
sous l'impulsion du CNES et de l'Aérospatiale, à proposer
le développement d'un lanceur entièrement nouveau, le
L
IIIS, qui deviendra Ariane.
L'Allemagne, de son côté, souhaite faire porter les principaux
efforts vers les vols habités, en coopération avec les États-Unis,
et met en avant le développement du Spacelab, laboratoire qui doit
être embarqué à bord de la navette spatiale (Space
Shuttle).
Le Royaume-Uni, suivant la tradition maritime britannique, a des ambitions
relativement plus modestes en dirigeant la promotion d'un programme de
satellites de télécommunications maritimes, et donc de MAROTS.
Le financement de l'ensemble de ces programmes d'application, qui s'ajoutent
au programme scientifique dit «obligatoire» de l'ESRO, pose
de très graves problèmes. Une conférence au niveau
des ministres des pays membres est organisée le 12 juillet 1973
afin de définir le programme des années à venir. Elle
devient rapidement orageuse et, afin d'éviter une rupture, est finalement
suspendue. Son président, le ministre belge Charles Hanin, se charge
d'une mission de «bons offices» entre les principaux interlocuteurs.
Cette mission se prolongera pendant une quinzaine de jours, et le 31 juillet,
la conférence à nouveau réunie se met d'accord sur
un «package deal» qui fera date dans l'histoire de l'espace
européen. Elle décide également de la date à
laquelle la nouvelle agence, l'ESA, entrera en fonctionnement : le 1er
avril 1974.
Les trois programmes sont approuvés, chacun des pays qui les
a proposés assurant une contribution majeure au financement. Pour
le nouveau lanceur, la France assure le financement à 62,50 %. Pour
Spacelab,
la contribution allemande est de 52,55 %, et pour MAROTS la part
du Royaume-Uni s'élève à 56 %.
C'est ainsi que naît le programme MAROTS. Pour la maîtrise
d'oeuvre du satellite lui-même, il est évident que Hawker Siddeley,
société britannique déjà maître d'oeuvre
d'OTS, n'a aucun concurrent possible, tant pour des raisons industrielles
que pour des raisons de «juste retour».
Pour la charge utile, la maîtrise d'oeuvre est à peu près
automatiquement attribuée à la société britannique
MSDS (Marconi Space and Defense Systems).
Les contrats de phase A sont rapidement attribués à ces
deux sociétés. Ils se terminent fin 1973. Les phases B sont
exécutées pendant le premier semestre de 1974, aboutissant
à des propositions pour la phase C/D.
Après les négociations d'usage, les contrats de phase
C/D sont attribués, fin novembre 1974, à Hawker Siddeley
pour un montant de 17,3 MUC, et à Marconi pour un montant de 21,1
MUC.
Le Département DSP dans MAROTS et MARECS
Dès que les caractéristiques prévisibles de
la charge utile de MAROTS sont connues, et en particulier les bandes
de fréquences dans lesquelles elle fonctionnera, la Direction du
Département Espace-Satellites (dont le nom sera changé de
ESA en DSP fin 1974) tente de déterminer quels matériels
pourraient être offerts dans ce programme avec quelques chances de
succès.
Les récepteurs en bande Ku, déjà étudiés
pour OTS, peuvent, avec d'éventuelles modifications certainement
peu importantes, être utilisés pour MAROTS. C'est effectivement
le cas, et ces récepteurs sont retenus par le maître d'oeuvre
Marconi.
Un autre point d'intérêt pour le Département ESA
est un développement entièrement nouveau : un amplificateur
de puissance (50 watts) en bande L à l'état solide. Le Service
HY, dirigé par Marcel Palazo, se met au travail en concevant pour
cet amplificateur une structure modulaire permettant d'obtenir la puissance
requise en mettant en parallèle, avec des dispositifs de couplage
adéquats, les transistors qui commencent à être disponibles
sur le marché.
La réalisation d'une maquette est très avancée
lorsque, au moment d'établir la proposition pour la phase C/D, le
maître d'oeuvre Marconi fait savoir qu'il se réserve la fourniture
de l'amplificateur de puissance. Thomson-CSF doit, par conséquent,
y renoncer. Il serait très difficile de contester la décision
car, d'une part, la contribution française au financement du programme
est relativement modeste et, d'autre part, elle est presque entièrement
absorbée par la participation de MATRA à la construction
de la plate-forme dérivée d'OTS. Il faut donc se contenter
de la fourniture des récepteurs en bande Ku.
La première maquette, réalisée sous la direction
du Service HY, est livrée à Marconi durant le troisième
trimestre de 1975. Les modèles d'identification seront livrés
près d'un an plus tard pour une intégration du modèle
d'identification de la charge utile, prévue pour commencer en octobre
1976. La fabrication des modèles de vol des récepteurs débutera
vers la fin de 1976.
Pendant ce temps, les pourparlers continuent au niveau international
afin de matérialiser l'existence d'Inmarsat. Les ministres des pays
membres de l'ESA, qui a pris la suite de l'ESRO au milieu de 1974, approuvent,
en février 1977, la mise en fabrication d'un second modèle
de vol de MAROTS.
Dès la moitié de 1977, il apparaît que pour homogénéiser
un futur système mondial, les liaisons entre les satellites et les
stations terriennes devront être effectuées en bande C, au
lieu de la bande Ku qui a été prévue pour MAROTS.
La décision finale du passage à la bande C est prise au
début de 1978 par le Conseil directeur des programmes de télécommunications.
Les industriels sont autorisés à travailler sur les nouvelles
fréquences à partir de février 1978.
Le programme change alors de nom pour être appelé MARECS.
Il ne s'agit plus de satellites expérimentaux : ils doivent être
opérationnels dans le cadre du système mondial.
Au Département DSP, le Service HY doit reprendre l'étude
des récepteurs pour les adapter aux nouvelles fréquences.
Comme à l'habitude avec les marchés de l'ESA, les premiers
mois de travail sont financés par LOL (Limit Of Liability), car
le premier contrat avec le maître d'oeuvre pour les deux premiers
satellites MARECS, d'abord prévu pour octobre 1978, n'est
effectivement signé qu'au début de 1979. Le sous-contrat
attribué à Thomson-CSF pour les récepteurs arrive
quelques semaines plus tard.
Les propositions faites par l'ESA au «joint-venture» qui
deviendra Inmarsat portent sur un total de quatre satellites MARECS,
dont trois opérationnels et un satellite de rechange. En raison
de problèmes internes aux États-Unis où, entre autres,
le débat devant aboutir à la désignation de l'entité
(Comsat ou le consortium Marisat) qui représentera ce pays à
Inmarsat se prolonge, la décision sur la configuration initiale
du système mondial tarde à venir.
Néanmoins, en juillet 1979, au moment où Inmarsat finit
par entrer en existence (le 16 juillet), l'ESA décide de préfinancer
un troisième modèle de vol de MARECS.
L'étude et la fabrication des récepteurs pour les trois
satellites se déroulent dans des conditions relativement bonnes.
Seul un problème technologique avec des substrats de microélectronique,
survenu en novembre 1979, provoque quelques inquiétudes, mais il
est rapidement résolu.
Sous
les ordres des chefs successifs du Service HY, Marcel Palazo, jusqu'en
octobre 1979, puis de Pierre de Bayser, qui lui succède, le principal
responsable du développement, du suivi de la fabrication et des
essais est André Arbonel, avec J.-L. Peysson comme ingénieur
de qualité. Les livraisons des différents modèles
de vol des récepteurs s'échelonneront au cours de l'année
1980.
Le
premier satellite, MARECS I, est mis en orbite le 20 décembre
1981. Malgré quelques problèmes de décharges électrostatiques
qui perturbent son contrôle d'attitude, il accomplit correctement
sa mission pour Inmarsat, qui l'a mis en service opérationnel le
1er mai 1983.
Le lancement de MARECS II est un échec pour le lanceur
Ariane
le 9 septembre 1982.
Avant la mise en orbite du troisième modèle, Marconi renvoie
à DSP le récepteur qui, à la suite d'un long stockage,
doit subir une vérification complète. Ce travail est effectué
dans les derniers mois de 1982, et le récepteur est livré
à nouveau à Marconi le 29 décembre 1982.
Le satellite MARECS II B est mis en orbite presque un an plus
tard, le 9 novembre 1984.
ECS
Dès les premières réflexions qui déboucheront
sur la mise en place du programme expérimental OTS, l'ESRO
a pour intention d'aboutir à un système européen opérationnel
de télécommunications par satellites qui doit entrer en service
à partir de 1980.
Outre les problèmes techniques habituels, la mise en place d'un
tel système, dédié aux services fixes, rencontrera
des problèmes réglementaires.
Les
futurs utilisateurs du système, c'est-à-dire les administrations
des Postes et Télécommunications d'un certain nombre de pays
européens, groupées au sein de la CEPT (Commission Européenne
des Postes et Télécommunications), travaillent en liaison
constante avec l'ESRO (puis l'ESA) aux définitions préliminaires
du système. Une synthèse des différents avis est relativement
facile à obtenir.
La principale difficulté viendra de l'organisation mondiale Intelsat,
dont font partie tous les pays membres de la CEPT. La charte d'Intelsat,
qui a mis sur pied un système mondial de télécommunications
par satellites, précise que tout pays ou groupe de pays désirant
mettre en place un système régional doit au préalable
apporter la preuve que ce système ne nuira pas aux intérêts
d'Intelsat.
Il est essentiel, pour les pays européens, de ne pas renouveler
l'expérience du programme Symphonie pour lequel les États-Unis,
membre prépondérant au sein d'Intelsat, n'ont autorisé
le lancement des satellites Symphonie par des lanceurs Delta
qu'à la condition que ces satellites n'aient aucune utilisation
commerciale.
Il s'ensuit, avant que le principe d'un système européen
opérationnel ne soit adopté, une longue série de négociations
entre la CEPT et l'ESRO d'une part et la Comsat, qui représente
les autorités américaines au sein d'Intelsat. Les représentants
de l'Administration française au sein de la CEPT y jouent un rôle
essentiel.
En février 1977, le conseil de l'ESA est en mesure d'approuver
le principe d'un programme opérationnel.
Les maîtrises d'oeuvre pour la réalisation des satellites
et de leurs charges utiles doivent logiquement revenir aux industriels
qui en ont eu la charge dans le programme OTS. Ces industriels,
HSD pour les satellites, et AEG-Telefunken pour les charges utiles, ont
exécuté préalablement des études de définition
d'ECS qui ont largement utilisé l'expérience acquise
avec OTS.
La charge utile d'un satellite ECS doit comprendre douze canaux
de répéteurs entièrement redondants, dont au moins
neuf doivent pouvoir être alimentés simultanément en
dehors des périodes d'éclipse.
Initialement, il a été prévu que six canaux auraient
une largeur de bande de 120 MHz et les six autres une largeur de 40 MHz.
Finalement, la solution adoptée est celle d'une même largeur
de bande de 80 MHz.
Le démarrage de la phase C/D est approuvé en juillet 1977
avec un financement provisoire s'étendant jusqu'en novembre de la
même année.
Des prolongations successives de deux mois chacune sont accordées
jusqu'à la signature, puis la mise en vigueur, le 14 septembre 1978,
de l'accord entre l'ESA et son «client», l'organisation «Eutelsat
intérimaire», qui vient d'être créée par
les pays membres de la CEPT. Ce n'est qu'à la fin de 1978 que les
négociations entre l'ESA et les maîtres d'oeuvre aboutissent
à la signature des contrats de phases C/D pour les deux premiers
satellites.
Les activités ECS au Département DSP
Thomson-CSF et le Département DSP n'ayant pas démérité
dans le programme OTS, il est logique que la réalisation
des récepteurs en bande Ku et des OMUX leur soit confiée,
et ce sera le cas.
|
ECS - Récepteur en bande Ku à 14 GHz
|
Si les récepteurs restent assez voisins de ceux d'OTS,
en bénéficiant cependant de quelques progrès techniques
et technologiques, l'ensemble des OMUX est beaucoup plus complexe en raison
du nombre de canaux et du schéma de redondances. C'est l'occasion,
en liaison avec la Division DFH, de perfectionner la technologie de l'invar
mince.
|
ECS - Multiplexeur de sortie en bande Ku à 11 GHz
Technologie Invar
|
Ayant commencé en 1978, après que la définition
de la charge utile a été établie par le maître
d'oeuvre, les travaux d'étude sont exécutés sous la
direction de Marcel Palazo, puis de Pierre de Bayser à partir d'octobre
1979.
C'est en juillet 1979 qu'à la suite d'une CDR (Critical Design
Review), la mise en chantier du premier modèle de vol (protoflight)
a été autorisée.
Les premières livraisons des récepteurs et des OMUX sont
effectuées au cours de l'année 1980. Les essais du premier
modèle de vol de la charge utile chez le maître d'oeuvre AEG
se terminent en février 1981 et le satellite est lancé avec
succès le 16 juin 1983.
Les travaux se poursuivent pour ECS 2, qui est lancé l'année
suivante, le 4 août 1984, sur la même fusée Ariane
que le premier modèle de
Telecom 1.
Alors que les OTS ont été lancés par des
lanceurs américains Delta, les ECS sont mis en orbite
par Ariane, ce qui a nécessité quelques adaptations
par rapport à la conception de base de la plate-forme d'OTS.
La suite du programme
Le
15 mai 1979, l'ESA a signé l'accord final sur le segment spatial
d'ECS avec l'organisation Eutelsat, finalement constituée
et faisant suite à «Eutelsat intérimaire».
Les négociations se poursuivent pour la fourniture par l'ESA
de trois modèles de vol supplémentaires, portant le total
à cinq. L'avenant au contrat avec le maître d'oeuvre, pour
ce prolongement du programme, est signé en juillet 1980.
C'est ainsi que le Service HY doit poursuivre sa tâche. Pierre
Fraise y remplace Pierre de Bayser en octobre 1981. Le suivi détaillé
des travaux est assuré par André Arbonel qui reçoit
en particulier, pour les compléments d'études et les essais,
le renfort de Daniel Parise, qui vient de terminer le programme TDRSS.
Les livraisons de DSP s'échelonneront entre 1981 et 1982 sans
incident notable. Les trois derniers satellites seront lancés quelques
années plus tard.
Le lancement d'ECS 3 est un échec le 12 septembre 1985.
ECS
4 et 5 sont mis en orbite respectivement le 16 septembre 1987 (15 septembre
à l'heure de Kourou) et le 21 juillet 1988.
C'est la fin du programme de satellites opérationnels piloté
par l'ESA. Les programmes suivants seront et continuent d'être pris
en charge par l'organisation Eutelsat elle-même.
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