6 - Les programmes de satellites
6.2 - Les satellites de télécommunication
Le programme
Au début de la décennie quatre-vingt-dix, la septième
génération de satellites d'Intelsat devient la série
la plus puissante de la flotte de cette organisation. Les satellites présentent
en particulier la nouveauté de pouvoir reconfigurer en temps réel
leur zone de couverture pour tenir compte du profil du trafic et de l'évolution
des besoins du marché. Par rapport à ceux des générations
précédentes ils permettent de fonctionner avec des stations
terriennes de plus petites dimensions, de maintenir leurs performances
en orbite inclinée et d'avoir un accès sécurisé
en télécommande.
Deux versions successives seront réalisées : Intelsat
VII et Intelsat VIIA, les différences portant sur une
augmentation du nombre de canaux et des puissances d'émission en
bande Ku.
En 1988, la société américaine Ford Aerospace,
chef de file d'un groupe d'industriels international et qui deviendra plus
tard Space Systems Loral (SS/L), est sélectionnée par Intelsat
pour fournir un premier lot de cinq satellites (701 à 705) de la
série Intelsat VII. En cours de contrat et à la suite
d'un nouvel appel d'offres, deux exemplaires (706 et 707) du type Intelsat
VIIA seront commandés en 1990, suivis d'un troisième
(708) en 1992. Enfin, un sixième exemplaire (709) de la série
Intelsat
VII sera commandé en 1993.
Dans la version Intelsat VII, la charge utile comprend :
- 26 canaux en bande C équipés d'amplificateurs de sortie
à l'état solide dont les puissances s'échelonnent
entre 10 et 30 watts ;
- 10 canaux en bande Ku équipés de TOP dont les puissances
vont de 35 à 50 watts.
Dans la version Intelsat VIIA, le nombre de canaux en bande Ku
passe de 10 à 14 et leur puissance est plus élevée,
allant de 49 à 73 watts.
Le groupe d'industriels constitué par SS/L s'appuie principalement
sur un pôle européen mené par Alcatel Espace et un
pôle japonais comprenant Mitsubishi Electric Company (MELCO) et Nippon
Electric Company (NEC). Les contrats passés à ces industriels
sont établis dans un esprit de fabrication et d'intégration
«sur plans», ce qui signifie qu'en plus de l'ingénierie
et des plans d'intégration d'ensemble le maître d'oeuvre SS/L
se charge de rédiger les spécifications détaillées
de tous les matériels, ainsi que les plans d'intégration
des différents sous-systèmes qu'il sous-traite.
Les enjeux
L'obtention du contrat représente pour Alcatel Espace, et
pour les autres sociétés européennes, un enjeu industriel
considérable.
Il faut, pour Alcatel Espace :
- montrer son outil industriel, que les Américains sont loin
de soupçonner ;
- démontrer sa capacité à participer à la
fabrication en série de satellites ;
- démontrer son aptitude à faire plus que de la simple
fabrication ;
- se mesurer au marché international sur le plan de la tenue
des coûts, des délais de livraison et de la qualité
de la fabrication ;
- prouver qu'elle est un partenaire majeur.
En contrepartie il faut, pour le maître d'oeuvre SS/L :
- apprendre à conduire, à grande distance, des sous-traitances
de pans importants d'activité ;
- apprendre à déléguer une partie de son autorité
sur ces activités ;
- apprendre qu'il lui est possible de sous-traiter les travaux de conception
et d'ingénierie d'ensembles homogènes.
Les travaux à ATES
Dans le cadre du contrat, quatre types de tâches sont confiés
à ATES :
- tâches d'ingénierie système ;
- tâches de suivi d'équipements ;
- tâches de fabrication d'équipements ;
- tâches d'intégration et d'essais des répéteurs.
Les travaux d'ingénierie système consistent en une participation,
dans les locaux du maître d'oeuvre, à Palo Alto, et sous sa
responsabilité directe, à des tâches d'ingénierie
concernant les répéteurs de la charge utile. Ces tâches
se traduisent donc par des détachements de personnel aux États-Unis,
ce qui est en fait une location de «matière grise».
Elles portent sur la conception des répéteurs, la préparation
de l'intégration des satellites et son suivi pour les six premiers,
ainsi que le suivi de l'assurance produit.
Les tâches de suivi d'équipements se traduisent par l'établissement
des sous-contrats, le suivi du développement et de la réalisation
des équipements des répéteurs chez les industriels
européens et japonais, ainsi que des équipements fabriqués
par ATES. Étalées sur quatre ans, elles portent sur plus
de deux mille cinq cents équipements représentant une dizaine
de familles. Elles sont remplies par un groupe de projet qui assume également
la responsabilité de la gestion de l'ensemble du contrat d'ATES
vis-à-vis du maître d'oeuvre et du client final. Les chefs
de projet successifs sont Gilles Lévêque, Jacky Teissèdre
et Jean-Louis Lacaze.
Pour les équipements réalisés à ATES, essentiellement
des récepteurs et des convertisseurs de fréquences, les tâches
sont les études, le développement, la fabrication et les
essais. À cette occasion, une plate-forme spécifique de fabrication
et d'essais est mise en place afin d'effectuer les travaux en série.
Une centaine d'unités sont livrées chaque année pendant
quatre ans.
Les tâches d'intégration consistent dans l'assemblage,
l'intégration et les mesures des performances des répéteurs
de la charge utile. Cette activité inclut, en phase de préparation,
l'étude et la réalisation des moyens électriques (bancs
de tests) et mécaniques (chariots, conteneurs, etc.) nécessaires
à son exécution. Les travaux «amont» d'aménagement
des équipements sur la structure du satellite (dossier d'assemblage)
sont exécutés par le bureau d'étude du maître
d'oeuvre.
L'ensemble des répéteurs est placé sur des panneaux
radiatifs, c'est-à-dire sur les panneaux nord et sud de la structure
du satellite. Chaque panneau a une surface d'environ huit mètres
carrés, les équipements y étant installés sur
plusieurs niveaux.
Un processus particulier d'intégration est développé
à cette occasion. Par exemple, un atelier spécifique de fabrication
des câbles coaxiaux est développé, permettant une production
sur mesure de plus de cinq mille câbles en trois ans.
Les moyens en matériel et en personnel mis en place sont ajustés
de manière à obtenir une cadence d'intégration d'un
satellite par quadrimestre, soit un panneau tous les deux mois avec une
durée moyenne de sept mois pour l'intégration et les essais
d'un seul panneau. Le nombre d'équipements et de pièces manipulés
dépasse dix mille pour les dix-huit panneaux.
Les lancements des différents satellites de la série Intelsat
VII ont lieu aux dates suivantes :
Intelsat 701 |
Ariane 44LP |
20-10-1993 |
Succès |
180° est |
Intelsat 702 |
Ariane 44LP |
17-06-1994 |
Succès |
177° est |
Intelsat 703 |
Atlas IIAS |
06-10-1994 |
Succès |
57° est |
Intelsat 704 |
Atlas IIAS |
10-01-1995 |
Succès |
66° est |
Intelsat 705 |
Atlas IIAS |
22-03-1995 |
Succès |
18° ouest |
Intelsat 706 |
Ariane 44LP |
17-05-1995 |
Succès |
53° ouest |
Intelsat 707 |
Ariane 44P |
14-03-1996 |
Succès |
1° ouest |
Intelsat 708 |
Long March 3B |
14-02-1996 |
Echec |
NA |
Intelsat 709 |
Ariane 44P |
15-06-1996 |
Succès |
50° ouest |
Le programme Intelsat VII a permis à Alcatel Espace non
seulement d'asseoir sa réputation internationale dans les domaines
qui viennent d'être passés en revue, mais en plus d'élargir
ses capacités de maîtrise d'oeuvre. |